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Quel est l’intérêt de mesurer les oligo-éléments chez les bovins ?

Actualité03/12/2021SantéBovins viande, Bovins lait

Par oligo-éléments on entend des éléments chimiques nécessaires à la vie des êtres vivants à l’état de traces c’est-à-dire requérant des apports minimes (en général, les besoins sont inférieurs à 100 mg / kg de Matière Sèche). Les oligo-éléments indispensables aux plantes peuvent différer sensiblement de ceux des animaux aussi bien quantitativement que qualitativement.

Chez les bovins, les oligo-éléments dont le rôle est reconnu se limite au fer, zinc, cuivre, manganèse, iode, sélénium et cobalt.

 

Vis-à-vis de ces oligo-éléments, la situation la plus communément rencontrée en France est un état de subcarence ou de carence marginale se traduisant par des troubles à l’échelle du troupeau ou simplement une diminution des performances : rations mal valorisées, problèmes sanitaires récurrents, moindre résistance aux infections et aux parasites, échecs vaccinaux, baisse de fertilité, boiteries etc.

 

Dans quelles situations peut-on envisager des profils oligo-éléments ?

 

Des troubles observés à l’échelle du troupeau peuvent être des signes d’appel d’une carence en tel ou tel oligo-élément. Par exemple, il est bien établi qu’un déficit en sélénium / vitamine E / iode induit des non-délivrances et une fragilité des veaux (mortinatalité, faible poids à la naissance, moindre qualité du colostrum). Des boiteries peuvent être favorisées par des apports insuffisants de cuivre / zinc / manganèse. Un manque de cobalt dans la ration peut diminuer l’ingestion et donc la croissance des jeunes. Des carences même marginales en oligo-éléments peuvent altérer les performances de reproduction des vaches (rétention placentaire, métrites, chaleurs silencieuses, baisse de fertilité). Malheureusement, la moindrespécificité des symptômes voire leur discrétion ne permettent pas de poser un diagnostic de carence avec certitude.

 

On doit aussi suspecter l’intervention des oligo-éléments lors de problèmes récurrents réfractaires aux traitements habituels : mammites, maladies néo-natales, troubles locomoteurs, baisse des performances de reproduction etc.

 

La vérification de la ration est une étape qui permet d’objectiver assez facilement les apports. En revanche, pour un diagnostic plus précis des carences, il est indispensable d’aller mesurer le statut chez l’animal grâce à des analyses biochimiques. Par ailleurs, il est recommandé d’effectuer ce genre d’analyses lorsque l’on suspecte une carence induite (par excès de fer ou molybdène par exemple) puisque les apports sont jugés a priori corrects mais la biodisponibilité est en réalité insuffisante pour l’élément carencé.

 

Quelles sont les règles pour un bon échantillonnage des individus ?

 

Le nombre d’animaux à prélever peut être déterminé à partir de modèles statistiques tenant compte de la prévalence estimée de la carence et de la variabilité des mesures. Ainsi pour certains auteurs, la taille de l’échantillon à prélever se situe idéalement autour de 8-12 individus. Pour des raisons de coûts cependant, les laboratoires d’analyses proposent de ne prélever que 5 animaux mais en les choisissant sur des critères stricts de représentativité.

 

Comme il existe une grande diversité biologique au sein d’un troupeau (âge, niveau de production, stade de lactation ou de gestation), il faut s’efforcer de réduire ces sources de variation en optant pour un échantillon très homogène. Selon la problématique, il faut prélever des individus proches en âge ou encore en stade de lactation mais dans tous les cas recevant un régime alimentaire stabilisé depuis au moins 3-4 semaines (délai d’adaptation de la faune et de la flore du rumen).

 

Le stress et les phénomènes inflammatoires modifient notablement la concentration des oligo-éléments circulants dans le sang (diminution ou augmentation des taux sériques selon l’oligo-élément). Ainsi, le vêlage et le premier mois de lactation induisent un stress oxydatif et un état inflammatoire chez la vache. De même, toute infection aiguë ou chronique est de nature à modifier le statut en oligo-éléments. Pour ces raisons, il faut écarter des prélèvements les animaux malades et les vaches en début de lactation (< 1 mois).

 

Quelles méthodes d’analyses choisir ?

 

Les dosages sanguins sont les analyses les plus répandues et aussi celles qui sont le mieux validées sur un plan scientifique. Ces profils sanguins donnent toujours une image instantanée du statut en oligo-éléments et pour un groupe d’individus donné.

 

Bien que plus coûteuses, les analyses individuelles (un profil par animal) donnent une mesure plus juste au niveau du troupeau qu’une analyse de mélange susceptible de masquer des situations de carences. L’analyse de mélange va en général sous-estimer la carence tout spécialement si elle porte sur un nombre restreint d’animaux (par exemple 5).

 

Récemment, des essais ont été menés dans certains laboratoires pour évaluer la pertinence des analyses sur pool (mélange de plasmas). Cette approche pourrait être valide sous certaines conditions et certains oligo-éléments : lot d’individus parfaitement homogène, dosage possible pour l’iode et le sélénium (en revanche, analyse de mélange non validée pour le cuivre). L’interprétation n’est alors possible qu’en cas de valeurs particulièrement basses (carences sévères) ou élevées (intoxication). En présence de carences modérées, l’analyse sur pool n’est pas recommandée.

 

Le prélèvement de sang doit se faire à la veine jugulaire car des souillures sont possibles en prélevant à la queue. Pour éviter toute rupture des globules rouges (hémolyse), l’aiguille doit être de diamètre suffisant et le tube bien rempli. Il ne faut pas prélever à la seringue. La centrifugation des tubes et le recueil du plasma est indispensable avant l’envoi par la poste.

 

Le moment de la journée choisi pour le prélèvement importe peu pour les oligo-éléments eux-mêmes. Des rythmes circadiens ont seulement été décrits pour les hormones thyroïdiennes et de façon très minime pour l’iode inorganique plasmatique ou le sélénium plasmatique.

 

Des analyses sont possibles à partir du lait (individuel ou de tank) pour le sélénium et l’iode (USA). Les analyses de lait de tank peuvent être entachées d’imprécisions du fait de l’hétérogénéité des statuts au sein du troupeau voire d’erreurs en cas d’usage de produits de post-trempage iodés. La présence de sang dans le lait (hémolactation) peut également fausser le résultat du sélénium.

 

Des analyses sont parfois pratiquées sur du poil ou des urines mais elles ne font pas l’objet d’un consensus scientifique. En effet, ce type d’échantillons est fortement soumis au risque de contamination par l’extérieur (bouses, terre, poussières etc.). La teneur en oligo-éléments du poil est extrêmement variable en fonction de facteurs intrinsèques : longueur, couleur, localisation, race et même sexe et âge. La composition du poil est d’autre part totalement indépendante des apports alimentaires et l’établissement de valeurs de référence n’a pas été réalisé à ce jour. Le prélèvement d’urine est déconseillé y compris pour le dosage de l’iode (existence de mécanismes de régulation dans l’organisme, manque de fiabilité).

 

Y a-t-il des interactions possibles entre la ration et les statuts en oligo-éléments ?

 

Une analyse de la ration est judicieuse pour rechercher d’éventuelles interactions entre éléments chimiques, susceptibles de réduire la biodisponibilité de certains oligo-éléments. Il est ainsi prioritaire d’évaluer les teneurs en soufre, fer et molybdène de la ration voire de l’eau d’abreuvement.

 

L’excès de soufre (eau d’abreuvement chargée en sulfates, sulfate d’ammonium utilisé comme fertilisant, distribution de pulpes de betteraves surpressées, vinasses) réduit la biodisponibilité du cuivre et du sélénium (Soufre > 2000 mg / kg MS). De fortes teneurs en molybdène (mélasse, fourrages) peuvent avoir les mêmes effets.

 

Des déficits secondaires en cuivre ont aussi été décrits par excès de fer dans la ration (Fe > 250-500 mg / kg MS, apport de terre dans les silos) ou l’eau de boisson.

 

Une carence en iode peut être consécutive à l’ingestion de substances dites goitrogènes (à l’origine d’un goitre thyroïdien) contenues dans certaines plantes ou matières premières : graine de lin, patates douces, manioc cru, millet, plantes de la famille des brassicacées (chou, colza, navet, moutarde).

 

De nombreux autres antagonismes existent vraisemblablement et perturbent l’assimilation des oligo-éléments mais les mécanismes d’action ne sont pas encore connus.

 

Enfin, certains médicaments utilisés contre la grande douve (closantel, nitroxinil) peuvent majorer le résultat de l’iode.

 

 

Jean-Luc Jobert

Vétérinaire-Conseil Seenovia

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