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Veaux sous la mère : maîtriser les strongles digestifs, une question d’équilibre et de stratégie

Actualité15/04/2020

Au printemps, les pâtures déjà utilisées l’année précédente sont contaminées par des larves de strongles ayant persisté

durant l’hiver (larves résiduelles) mais aussi dans une certaine mesure par les mères qui excrètent des oeufs [...]

Les sources d’infestation


Au printemps, les pâtures déjà utilisées l’année précédente sont contaminées par des larves de strongles ayant persisté durant l’hiver (larves résiduelles) mais aussi dans une certaine mesure par les mères qui excrètent des oeufs. Pour décrire ce phénomène, on parle d’un premier « pic d’infestation de printemps ». Dans le même temps, les adultes qui possèdent une bonne immunité contre les strongles ont une action décontaminante sur la pâture. A charge animale équivalente, un pâturage mère / veau diminue par 5 la contamination des veaux ! D’autre part, les veaux ne vont ingérer des quantités significatives de larves infestantes qu’au-delà de l’âge de 2-3 mois. En avançant dans la saison, les veaux confrontés pour la première fois aux strongles digestifs vont assurer un recyclage parasitaire actif. La succession des générations de parasites sur la pâture et chez les bovins va faire grimper la charge parasitaire globale. En climat tempéré, on assiste alors à un second pic d’infestation mais cette fois-ci en été. Il est important de noter que seule une petite partie des veaux est responsable de la majorité de la contamination de la pâture, le taux d’excrétion parasitaire dépendant de facteurs individuels (résistance au parasite innée et acquise des individus).

 

Les enjeux de la première saison à l’herbe


La première année de pâture des veaux coïncide avec le début de leur immunisation contre les strongles. L’infestation parasitaire ne doit pas pour autant altérer la croissance (rôle des mesures agronomiques et des traitements). Plus précisément, l’objectif pour les génisses de renouvellement est double :
• Développer une immunité forte au cours des 2 premières années de pâture (nécessité d’un contact d’au moins 8 mois avec les strongles du genre Ostertagia)
• Préserver de bonnes aptitudes de croissance.


Chez le jeune, les conséquences d’une infestation par les strongles digestifs peuvent être :
• Zootechniques : baisse de l’état général, retards de croissance, perte de poids pouvant aller jusqu’à –20% en 7 à 10 j dans le cas de l’ostertagiose de type I (*)
• Sanitaires : baisse d’appétit par dérèglements hormonaux, augmentation du pH de la caillette et perturbation de la flore bactérienne, diarrhées possiblement sévères dans le cas de l’ostertagiose de type I.


Gestion du risque de strongyloses digestives


Pour les troupeaux allaitants, la gestion des strongyloses digestives doit être raisonnée en fonction de l’âge du veau au moment de la mise à l’herbe (paramètre déterminant la quantité d’herbe ingérée) :
• Les veaux nés à l’automne ingèrent des larves infestantes dès le début de la saison. Dans le cas d’un pâturage continu, sans mesure de réduction du risque parasitaire (rotation, complémentation ou traitement), les premiers effets du parasitisme peuvent apparaître en juillet-août (ostertagiose de type I).
• Les veaux nés en hiver s’infestent de façon significative plus tardivement dans la saison, généralement en septembre-octobre (plus ou moins tard selon qu’il y a sécheresse estivale ou non). C’est en fin d’automne que la charge parasitaire devient maximale et qu’il faut intervenir.

Pour limiter le risque parasitaire chez les veaux, des mesures de 2 ordres sont applicables : mesures agronomiques et vermifuges empruntés à la médecine conventionnelle. Aujourd’hui, les élevages conventionnels tendent à utiliser conjointement les 2 types de mesures.


Mesures agronomiques :
• Fauche préalable (ensilage, foin) : faible pouvoir contaminant des repousses
• Chargement des parcelles limité (< 2 UGB / ha)
• Complémentation au pré pour les veaux
• Rotation de pâtures avec des temps de séjour courts (2 semaines)
• Maintien d’une hauteur d’herbe suffisante : les larves infestantes L3 se retrouvent le plus souvent sur les 2 cm inférieurs de la plante

 

Mesures médicales : aide à la décision et principes généraux
• Mesure du GMQ en milieu de saison de pâture afin de détecter les animaux infestés et devant être traités (sensibilité de 70 %). Une corrélation a été démontrée entre le niveau d’excrétion parasitaire et le GMQ (Hoglund & al., 2009)
• Traitement associé à un changement de parcelle avant le pic d’été (stratégie d’évasion (**) couramment utilisée) : dans ce cas, le traitement devrait intervenir quelques jours après le transfert des bovins vers la nouvelle parcelle pour éviter la sélection de parasites résistants (Risque lié à la pratique du « dose and move ») (***)
• Molécules ayant un spectre étroit par exemple uniquement actives contre les strongles
• Alternance de familles de molécules pour réduire le risque de résistance des parasites
• Logiciel permettant d’analyser la gestion du pâturage afin d’estimer le risque parasitaire (Logiciel Parasit’Sim utilisé par les vétérinaires Conseil de Seenovia). La simulation permet de définir un traitement ciblé dans le temps (****)
• Données météorologiques de l’année en cours


Lors de la première saison de pâture, il existe 2 périodes stratégiques pour évaluer les besoins en traitement et établir un traitement ciblé :
• La première est 2 mois après la mise à l’herbe, période à laquelle les numérations parasitaires sont parfaitement indicatives de la charge infestante. Des auteurs ont établi le seuil de traitement à 100 oeufs par gramme (opg) (Areskog & al., 2013). Seenovia met à disposition de ses adhérents PSE un « kit copro » pour réaliser des coproscopies individuelles.
• Ensuite, une mesure du pepsinogène sérique idéalement 1 mois après la rentrée, donne une estimation des lésions induites par Ostertagia pendant la saison. En fonction des résultats, la stratégie de contrôle parasitaire pourra être réajustée l’année suivante.


En conclusion, ne pas surtraiter permet de ménager un équilibre acceptable entre le bovin et les strongles digestifs qu’il héberge. En deuxième saison de pâture, l’immunité doit être acquise ou en cours d’acquisition. Au moment des traitements, sélectionner les animaux à risque et cibler le moment optimal pour agir contribuent à réduire les coûts ainsi que le risque de résistance. Enfin, à la rentrée en bâtiments, des analyses de laboratoire sont utiles pour connaître le niveau d’infestation et nuancer les traitements.

 

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Ostertagiose de type I : Infestation par un strongle de la caillette du genre Ostertagia qui affecte les veaux de première saison de pâture et qui fait suite à une ingestion massive de larves infestantes en début d’été. Les symptômes sous forme d’une diarrhée profuse et persistante se manifestent à partir de la mi-juillet. La morbidité est généralement élevée.

 

Pratique du « dose and move » : Certaines pratiques comme le traitement lors du changement de pâture sont très défavorables. En effet dans ce cas, tous les animaux d’un lot sont traités avant d’être déplacés sur une nouvelle pâture. La nouvelle pâture est alors contaminée uniquement avec les oeufs des parasites ayant survécu au traitement, c’est à dire résistants.

 

Traitement ciblé : Le traitement ciblé est le traitement d’un lot d’animaux à une période donnée, en fonction du risque évalué (par opposition au traitement systématique). Il consiste à traiter l’ensemble
d’un groupe d’animaux en se basant sur la connaissance du risque parasitaire ou sur des paramètres de quantification et la sévérité de l’infection. L’objectif est de contrôler l’impact des parasites sur la production tout en préservant l’efficacité des molécules anthelminthiques (lutte contre la résistance des parasites).

 

Traitement ciblé sélectif : En plus de déterminer une date de traitement optimal, ce traitement a pour but de viser les individus les plus sensibles aux infestations parasitaires et ceux qui contaminent le plus. Pour rappel, 20-30 % des animaux sont responsables de 80 à 90 % de l’excrétion parasitaire. Pour ne traiter qu’une partie de lot, on utilise une forme orale ou injectable de vermifuge et non pas du Pour-On, propice à une ingestion du produit par léchage.

 

Stratégie d’évasion : Les animaux sont déplacés régulièrement, interrompant le cycle de succession de générations parasitaires. En théorie, ils partent avant que les larves L3 ne soient infestantes et ne
reviennent qu’une fois ces larves mortes. En zone tempérée, cette approche est difficile à mettre en oeuvre car il faudrait changer les animaux toutes les 3 semaines, sans remettre d’animaux avant l’année suivante.

 

 

Ostertagia : vers adultes sur la muqueuse de la caillette
(D’après Merck Veterinary Manual, 2011)

 

 

Logiciel Parasit’Sim : Evaluation des risques en fonction de la conduite de pâturage

 

Source illustration : https://charolaise.fr/ 

 

 

Dr Jean-luc Jobert

Vétérinaire conseil

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